vendredi 10 janvier 2014

Grandir


   La vie parfois change brusquement, et sans qu'on en sache trop pourquoi. On bascule d'un monde à l'autre et la transition est souvent pénible.

Je me souviens de l'enfance comme d'une époque où l'imagination est aussi importante que la réalité, et où un objet des plus simples peut devenir le support d'un divertissement inépuisable. 
 
Un jour, dans la forêt, je suis tombée en arrêt devant une branche morte toute tordu. Mais ce n'était pas une branche ordinaire, c'était un dragon!


J'ai attaché une ficelle autour de son cou, j'ai traîné mon nouveau meilleur ami vers la maison.




Mon petit camarade ne tarda pas à se trouver lui aussi un compagnon extraordinaire. Nous étions des dresseurs de dragon, nous étions invincibles. Nos dragons nous accompagnaient partout, nous les faisions ramper dans les flaques et siffler de plaisir car, comme mon oncle disait souvent "qui dit eau dit serpent" et, manifestement le dragon en est un proche parent.



La forêt représentait pour nous un terrain de jeu aux infinies possibilité. Nous avions une cabane qui ressemblait plus à un tas de branches et dans laquelle nous tenions à peine accroupis mais peu importait. Dans les bois nous étions des indiens, des explorateurs, des hommes des cavernes !


Il y avait cet arbre où nous grimpions pour devenir des singes, des hommes de la jungle, et les jours de grand vent des matelots pris dans la tempête! 


Malheureusement les meilleures choses ont une fin et l'imagination atteint ses limites.
Je m'en rendis compte que j'avais grandi un jour lorsque j'aperçus cette petite fille sur sa trottinette. 

 

Brutalement, je me rendis compte que je ne pourrais plus jamais remonter sur ma trottinette et prétendre avec autant de conviction qu'il s'agissait d'une licorne. 
 
L'arbre dans lequel j'avais vécu ces aventures palpitantes m'apparut soudain comme le pauvre laurier rachitique qu'il avait toujours été.

 
Mes repères fantasques s'évanouissaient peu à peu alors que je prenais de l'âge. Je me sentais poussée hors de l'enfance sans pour autant savoir comment me comporter dans le monde des adultes.
Je compris à mes dépends que certaines choses qu'on fait étant petit juste parce que c'est amusant ne sont plus convenables passé un certain âge.


 Se pendre à une branche, sauter par dessus un obstacle, piquer un sprint pour rien -et la liste est longue- ne sont pas des choses bien comprises par les grandes personnes.

Pour échapper aux railleries, je m'isolais. Mon imagination semblant tarie, je m'en remettais à celle d'Hollywood. Et de préférence en haute définition.  


 L'environnement dans lequel j'évoluais à présent et bien contre mon gré, était hostile, superficiel, régi par des règles absurdes. 


 Le conformisme ambiant m'étouffais. J'en étais même indisposée par la présence de mes semblables et de leur regard lourd de jugement. 
Je m'étais à tort imaginée que les adultes étaient des personnes raisonnables et justes, et je me rendais douloureusement compte que toutes les lois morales qu'on m'avait inculquées étaient balayées par celle de l'argent. Et je doutais fortement de ma propre rentabilité.

Il me fallait une échappatoire et à la fois un moyen de montrer qui j'étais. J'étais désespérée.


Jusqu'à ce qu'un jour...  

 Et c'est là que nous nous rencontrons, cher lecteur...

3 commentaires:

  1. petite histoire vraiment saisissante et dans laquelle je reconnais bien les personnages !! bravo lila

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  2. j'aime énormément cette histoire qui est plus que bien fait et reflète bien ce qu'on a vécu ou ce qu'on vie.

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  3. Que de chemin parcouru depuis cette époque et quelles aventures t'attendent encore! <3 Je repense souvent avec affection à nos moments partagés à Salins, lorsque toutes les deux nous cherchions notre place dans ce monde d'adulte. En relisant ton blog, j'ai toujours le même coup de coeur pour ton talent et surtout pour ce que tu caches au fond de toi et que tu laisses entrevoir de temps en temps.

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