L'école est un monde cruel et impitoyable. Avoir de bonnes notes ou être un peu différent fera de vous le parfait punchingball des tortionnaires de la cour de récréation. En revanche, si vous êtes un élève médiocre, le supplice aura lieu dans la salle de cours. Que vous ayez souffert de l'un ou de l'autre, ne vous plaignez pas trop: certains ont eu droit aux deux.
Les mathématiques ont été pour moi source d'angoisse et d'humiliation permanente. Et malgré mes tentatives pour paraître la plus transparente et insignifiante possible, j'étais constamment dans le collimateur de l'enseignant. Le professeur, cet être abject sorti tout droit des tréfonds de l'enfer...
Face à la terreur que cette situation m'inspirait, je sentais planer au dessus de moi le risque de sombrer dans la catatonie, ou à l'inverse dans le crime scolaire. Pour le salut de ma santé mentale je me devais de réagir.
A cours d'idée, je saisis mon stylo...
Et taillais le portrait de mon bourreau...
Puis je refermais violemment le cahier et imaginais mon ennemi écrabouillé, aplati, compressé comme un écureuil sous un 35 tonnes ou un coquelicot dans un herbier... quoique la comparaison soit plutôt inadaptée, je l'admet.
Ces caricatures devinrent très vite ma bouée de sauvetage. J'inventais chaque jour de nouveaux supplices. J'étais devenue une psychopathe de la feuille quadrillée.
J'étais désormais à l'affût de tout ce qui pouvait être le sujet d'une bonne caricature. J'épiais ses faits et gestes, un sourire malsain aux lèvres. Et au fil des jours, il sembla le remarquer. Mieux encore: il était effrayé...
A force de le dessiner pour m'en servir comme bouc émissaire, j'avais fini par éprouver une certaine sympathie pour mon petit personnage. Tellement qu'il finit par développer une personnalité propre et devenir un mème de mon univers imaginaire.
Je conclurais donc cette histoire par cette réflexion: on a tous en nous une part de violence, et croyez moi, l'exprimer ça peut être très amusant !